L’autorégulation dans l’entraînement en Kayak

Comment utiliser l’autorégulation dans l’entraînement ?

Dans mon article sur les bases de l’entraînement en kayak, nous avons vu qu’il existait différentes périodisations de l’entraînement mais que souvent, le plan ne se passait que rarement comme sur le papier.

La question qui se pose donc est : Peut-on anticiper les changements de forme de l’athlète et surtout déterminer sa forme du jour afin d’adapter le programme au mieux ?

Différents outils existent et cet article n’a pas pour but d’être exhaustifs mais de vous présenter les principaux outils de régulation facilement utilisables quelque soit votre niveau.

1 - Définition et utilisation de l’autorégulation dans l’entrainement

L’autorégulation consiste à analyser sa forme du jour afin d’adapter la séance du jour.

Si l’on a prévu une très grosse séance en ZT (zone transitionnelle, au SL2) comme avec un test 30' minutes et que l’on arrive avec des cernes pas possibles sous les yeux, des douleurs partout et aucune joie de vivre, autant dire que la séance a peu de chances d’être productives et qu’en plus, elle va nous faire sombrer encore plus bas.

Fervent partisan de suivre le plan, il n’empêche que la vie courante peut amener son lot de désagrément et donc générer de la fatigue.

Or, l’art du progrès sur le moyen et long terme (plusieurs mois à plusieurs années) est de bien calibrer ses entraînements en fonction de ses possibilités du moment afin de gérer la fatigue afin que celle-ci ne devienne pas “dominante”.

Bien que suivre le plan fonctionne et puisse fonctionner pendant des années, l’atteinte du très haut niveau (pour soi) nécessite d’améliorer sa compréhension de soi-même afin de véritablement personnaliser son programme d’entraînement jusqu’au jour le jour, bien qu’une trame doivent exister.

C’est ainsi que fonctionne l’autorégulation dans l’entraînement. Grâce à des outils plutôt simples et accessibles, cela va nous renseigner sur notre forme et corroborer nos ressentis afin de réaliser soit ce qui est prévu, soit d’adapter notre programme afin d’en tirer le meilleur parti.

Il serait inutile de faire une séance très difficile sur le papier en étant au minimum de ses capacités à moins de viser le “surentrainement”.

Quels outils donc utiliser ?

2 - Le plus simple : Le questionnaire de Wellness

Le questionnaire de Wellness, le plus accessible dans l’autorégulation de l’entraînement

Le plus simple à utiliser dans l’autorégulation de l’entraînement est le questionnaire de Wellness.

Ici, je vous propose une version simplifiée qui peut faire l’affaire et qui recense les principaux points auxquels il faut faire attention. L’idée est d’avoir le plus petit score possible ce qui signifierai que vous êtes en forme olympique.

Par exemple, si vous avez peu dormi et qu’en plus, vous vous êtes, sans arrêt, réveillé, il y a de grandes chances que cela impacte négativement votre forme.

D’expérience, à 20 ans, je ne sentais pas l’effet d’une nuit désastreuse quand 15 ans plus tard, m’entraînant tous les jours, je le sens bien sur des efforts intenses qu’il soit explosif sur l’eau ou lourd en salle de musculation (Je n’ose imaginer ce qui m’attend), moins sur des efforts à basse et intensité modérée.

Souvent négligé, on ne peut faire l’impasse sur un bon sommeil, que ce soit en durée ou en qualité pour être en forme aussi bien physique, que psychologique ou cérébral.

Le niveau d’énergie représente, pour moi, la confiance en ses capacités du jour. Est-ce que je me sens en forme ? Prêt à tout casser ? A vaporiser l’eau ? Ou au contraire, je me sens mou, léthargique et je serais mieux dans mon bain ou sous un pled ? Cela peut littéralement me pousser à sauter une séance pour mon plus grand bien !

C’est d’ailleurs le sens du troisième point, l’envie. Ai-je envie de m’entraîner ? Ai-je envie de progresser ? De tout donner ? Ou j’ai plutôt envie de ne rien faire, de regarder le paysage, d’aller me recoucher ?

Comme le disait très bien Patrick Lancereau dans l’épisode 51 des Secrets du Kayak :

Si on n’a pas envie, à moins d’un miracle, la séance ne sera pas constructive et sera au mieux une distraction. Parfois, il arrive que l’on trouve la foi après un bon échauffement mais cela reste rare d’après mon vécu.

Le quatrième point concerne les courbatures et autres douleurs qui peuvent être plus ou moins handicapantes. Si j’ai mal partout à cause d’une séance de musculation mal calibrée et que je peux à peine bouger, quelque soit la séance cela n’a pas de sens.

Si j’ai mal au dos et/ou aux épaules parce que je dépasse mes capacités d’adaptations / de mouvements, nous connaissons tous la chanson : Si on persiste dessus et que la pratique de l’activité accentue les douleurs articulaires / tendineuses, cela ne va pas aller en s’arrangeant.

Avoir des petites courbatures peut se concevoir mais dans le cas de douleurs articulaires / tendineuses, il faut prendre le problème à la source et s’en occuper sans tarder.

Plus on traîne une mauvaise douleur, plus celle-ci s’ancre dans notre système nerveux et plus elle aura du mal à partir (cf la mémoire), la douleur étant multifactorielle, même si l’on a plus d’atteinte au sens stricte du terme.

Le cinquième point parle d’alimentation. Sous-estimée dans l’impact sur la performance par de nombreuses personnes, je n’en reste pas moins convaincu via ma vie de coach depuis 2001 et de plusieurs milliers de personnes coachés via www.rudycoia.com, en plus de mon expérience personnelle, que celle-ci impacte fortement la forme.

Si je saute un repas la veille et qu’au lieu de consommer 4000 kcalories, je n’en consomme que 3000, cela va forcément jouer sur mes réserves de glycogène et donc m’impacter si je dois faire une séance en EB1+ (endurance de base 1, zone 3, tempo…).

De même que la consommation d’alcool (j’y reviens juste après), de fast-food ou autres aliments industriels influencent que ce soit par rapport à notre coeur et son fonctionnement mais aussi via la régulation de l’inflammation en agissant négativement sur les prostaglandines (des hormones du système immunitaire).

Je ne peux pas être au meilleur de ma forme, quoiqu’en disent les exceptions qui confirment la règle, en m’alimentant mal et au doigt mouillé.

Enfin, dernier point, le stress. Avez-vous passé une bonne journée ? Vous êtes-vous engueulé avec un collège, votre conjoint, vos enfants ?… Avez-vous été en mode orthosympathique toute la journée ou plutôt relaxé (en mode parasympathique - je reviendrais sur ces termes dans mon article sur l’entraînement respiratoire) ?

Tout cela peut avoir consommé une part plus ou moins importante de votre énergie et vous faire arriver complètement à plat à l’entraînement.

Le questionnaire de Wellness dans l’autorégulation de l’entraînement est à utiliser chaque jour, comme un scan de votre état global afin de renseigner sur l’évolution de votre forme.

Dans un monde où nous sommes de plus en plus déconnectés de nous-même et où nous courons après le temps, ces quelques minutes d’introspection ne peuvent faire que le plus grand bien.

Celui-ci prend moins de deux minutes et apportera des repères précieux afin d’ajuster les séances par rapport au plan, si besoin.

3 - L’application HRV4 Training

Un must dans l’autorégulation de l’entraînement en kayak

Pour aller encore plus loin dans l’autorégulation de l’entraînement, il existe une application disponible sur smartphone qui, en plus du questionnaire de Wellness analyse la variabilité cardiaque.

Il y a encore quelques années, il était très contraignant de mesurer sa variabilité cardiaque mais aujourd’hui grâce à HRV4 Training, cela est devenu un jeu d’enfant, pour mesurer la variabilité de son système nerveux autonome.

Comme beaucoup, j’ai douté de sa fiabilité au début puisque le test consiste à garder son doigt sur les capteurs arrières de son téléphone, loin du test de plusieurs minutes à faire en position allongé et debout.

Mais les études semblent démontrer sa fiabilité puisqu’elle a été approuvée scientifiquement comme on peut le voir sur le site de HRV4 Training.

Ainsi, chaque matin, vous avez une évaluation à faire idéalement dans les mêmes conditions et qui détermine, en plus de la mesure, après un questionnaire de Wellness intégré, quelle est votre forme du jour.

Pour en avoir discuté avec de nombreux collègues et amis qui l’utilisent, nous en arrivons tous à la même conclusion : C’est fiable et cela corrobore ce que nous observons sur le terrain.

L’application coûte 10 euros de mémoire ce qui est dérisoire par rapport à ce qu’elle apporte.

C’est pour moi un must à avoir et à utiliser en complément de l’outil suivant puisqu’ici, l’analyse est surtout cardiaque afin de savoir si notre coeur est en forme.

Toutefois, attention car comme cela ne mesure pas la “forme” du système nerveux orthosympathique, dit “activateur”, il peut y avoir des surprises de forme en cas d’efforts de haute intensité d’où l’intérêt des tests suivants complémentaires.

4 - Comment va votre système nerveux ?

Le dynamomètre où comment estimer votre forme nerveuse

Nous avons vu dans un précédent article que lorsque nous faisions des efforts intenses, la contribution du système nerveux était importante.

Or, c’est le “système” qui récupère le plus doucement après un effort.

Si nous avons programmé une séance de vitesse qui requiert de l’explosivité ou une séance de force en salle de musculation, il va sans dire que si nous ne sommes pas au mieux de nos capacités nerveuses, c’est à dire vis à vis de nos possibilité à utiliser nos muscles de concerts mais aussi nos fibres au sein du même muscle sans parler de la fréquence des impulsions pour chaque fibre qui va réguler sa force, la séance risque de ne pas être celle de prévue et les effets escomptés absents.

C’est en ce sens que l’utilisation d’un dynamomètre semble avoir montré un lien avec la forme nerveuse.

Si, par exemple, habituellement, vous êtes à 40 kg de pression et que vous êtes seulement à 32 kg ce jour, vous êtes à coup-sur en mauvaise forme.

L’important, pour déterminer sa fraicheur nerveuse, n’est pas d’augmenter la force de sa poigne, bien que cela puisse avoir un intérêt pour performer en kayak, mais d’être autour de sa valeur habituelle.

C’est un test à faire chaque jour après échauffement avant votre séance et qui peut donc permettre l’autorégulation de l’entrainement.

Pour moi, c’est un bon indicateur de la fraicheur nerveuse du haut du corps.

Cela coûte environ 40 euros et j’ai personnellement ce dynamomètre.

Pour le bas du corps, comme ce ne sont pas les mêmes nerfs périphériques qui sont utilisées et que l’on peut “souffrir” d’immunisation, c’est à dire de “fatigue” nerveuse locale, un bon test est l’utilisation du Sargent Test :

Le Sargent test ou comment tester sa forme nerveuse sur le bas du corps.

Comme le dynamomètre, cela se teste après échauffement et l’idée est d’être autour de ce que l’on fait habituellement.

Si l’on fait beaucoup moins, qu’il y a un écart de plus de 10%, c’est que ce n’est sans doute pas le moment de faire des sprints sur piste, de travailler sa vitesse et/ou sa force maximale.

Plus onéreux, l’utilisation d’un capteur de vitesse, notamment en salle de musculation peut avoir son intérêt pour aller encore plus loin dans l’analyse de sa forme nerveuse vis à vis des différents patterns de mouvements.

Car on peut être en forme pour pousser mais pas pour tirer, en forme des biceps mais pas des triceps…

L’intérêt des deux “outils” que je vous partage est qu’ils sont pratiques et rapides à faire et donnent d’assez bons résultats en terme d’évaluation.

4 - La balance est-elle une amie fiable ?

Ne nécessitant sans doute aucun achat pour beaucoup, la balance et le poids que l’on fait influence fortement nos performances, notamment en salle de musculation.

Pour ceux qui ont de la bouteille, la perte d’un kg sur la balance vous fera sans doute voler aux tractions mais vous sentirez les barres très lourdes au développé couché.

La balance permet de suivre l’évolution de son poids en fonction de ce que nous mangeons.

Comme l’alimentation est un facteur hautement négligé, de mon humble avis (l’article sur les bases de l’alimentation pour le kayak arrive prochainement), pour performer, il est intéressant de savoir si nous mangeons suffisamment ou pas assez pour soutenir nos efforts.

Car cela influence directement notre niveau d’énergie.

Ceux qui ont déjà fait un régime en passant par une restriction kcaloriques (Cf mon livre pour faire les choses correctement “Le guide de la sèche au naturel”) le savent très bien ; lorsque l’on mange moins que ses besoins, cela se fait vite ressentir sur notre psychisme et nos performances.

C’est normal car, alors, nos réserves de glycogènes s’amoindrissent ce qui impactent le volume d’entraînement intense que l’on peut faire, sans parler de l’impact hormonal négatif.

Nous ne sommes pas faits pour nous restreindre tout comme nous ne sommes pas fait pour nous suralimenter par rapport à nos besoins.

C’est en ce sens que la balance peut être utile car toute prise de poids ou perte de poids rapide influence nos capacités physiques, notre récupération, nos facultés à nous blesser…

Si je suis dans une période où je cherche à perdre du poids, on peut imaginer une réduction du nombre de séries à l’entraînement en kayak et/ou une diminution des poids en salle de musculation afin de réduire les risques de blessures.

C’est pourquoi le maintien d’un poids de forme toute l’année est primordial car il n’y a rien de pire que la restriction kcalorique pour performer.

5 - La fréquence cardiaque

Un signe de forme ou de fatigue peut être également détecté par la fréquence cardiaque.

Une perturbation, c’est à dire un écart de plus de 10%, que ce soit au repos ou à l’effort (5%) permet de déceler un problème.

La fréquence cardiaque de repos se prend généralement au réveil, toujours dans la même position et est un bon reflet du fonctionnement du système nerveux autonome, que l’on nomme également le système nerveux parasympathique.

Si ma fréquence cardiaque est plus élevée au réveil, on peut émettre l’hypothèse que les fonctions autonomes n’ont pas pu remplir toutes leurs tâches et qu’ainsi, ma récupération a été ralentie.

Cela peut être le cas, par exemple, si on s’entraîne trop par rapport à ses capacités, notre cœur passant alors trop de temps en mode orthosympatique (On utilise plus le mot “sympathique” pour décrire ce mode) et pas assez en zone para.

Evidemment, comme pour les filières énergétiques, nous ne sommes jamais à 100% dans l’un ou dans l’autre.

A l’effort, si nous utilisons habituellement un cardio-fréquence mètre, nous savons à combien de pulsations nous sommes pour quels types d’efforts.

Or, si je ne suis pas à mes valeurs habituelles à plus ou moins 5%, c’est le signe que je suis “fatigué” et qu’une autorégulation dans l’entrainement doit s’imposer durant la séance même pour permettre à mon cœur de récupérer.

Le cardio-fréquence mètre me semble être un outil facile à utiliser et qui donne de précieuses informations.

Toutefois, tous ne se valent pas et il y a de nombreux débats sur la fiabilité des montres connectées.

De mon expérience, les marques comme Garmin et Polar sont assez fiables à 5 pulsations près mais rien ne remplacera jamais la traditionnelle ceinture. C’est moins fiable lorsque l’on fait des efforts courts car le délai de latence avant que la “bonne” fréquence cardiaque se mette est un peu long mais sur des périodes de plusieurs minutes où l’effort reste le même, cela fonctionne assez bien.

Personnellement, j’utilise une Polar H10 :

Rien ne remplace la fiabilité d’une ceinture cardio !

En dehors de la détection des perturbations, suivre sa fréquence cardiaque a du sens pour s’entraîner dans les “bonnes zones” en fonction de ce que l’on souhaite développer principalement comme vu dans l’article sur les bases de l’entraînement en kayak et suivre ses progrès à ce niveau.

6 - Conclusion sur l’autorégulation dans l’entrainement en kayak

Pour tout kayakistes et céistes motivés, il me semble intéressant de suivre l’évolution de sa forme en dehors des ressentis subjectifs.

Aujourd’hui, pour peu de contraintes en terme de temps et d’argent, il est possible de suivre son état de forme physiologique et psychologique via des questionnaires, applications et gadgets.

Il y a évidemment des tests plus poussés que je n’ai pas abordé dans cet article qui se veut accessible et pratique à tous les niveaux de pratiques sportives.

Mais en utilisant les outils d’autorégulation dans l’entraînement cités ci-dessus, vous ferez déjà un bon en avant dans votre quête de performer au mieux tout en réduisant vos risques de tomber “malade” et vos risques de blessures.

Car, ne l’oublions pas, celui qui progresse le plus est celui qui ne se blesse pas.

C’est en ce sens que l’autorégulation dans l’entrainement prendra de plus en plus de place à mesure que vous progresserez.

Car suivre le plan coute que coute ne marchera pas indéfiniment.

J’espère en tout cas vous avoir éclairé sur le sujet.

Si vous souhaitez aller plus loin avec mes conseils, je vous invite à suivre ma Formation gratuite à destination des kayakistes et céistes motivés (mais pas que) en vous inscrivant ci-dessous.

A très vite,

Rudy

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