Interview : Sarah Guyot

Cette interview est la retranscription écrite du Podcast enregistré avec Sarah Guyot, réalisé au moins de novembre 2020 avant son départ pour un stage de préparation de trois semaines à Séville.

Les secrets du Kayak : Peux-tu te présenter ?

Sarah Guyot : J’ai 28 ans, je mesure 1m76 donc plutôt grande, et je pèse 71 kg. On va dire que le muscle pèse lourd (rire). Je suis diplômée en masseur-kinésithérapie, c’est plus pour mon après carrière et tant qu’athlète, actuellement, je suis dans l’armée des champions au bataillon de Joinville ce qui me permet de m’entraîner et d’être complètement détachée pour la préparation des Jeux Olympiques de Tokyo et des compétitions.

Au niveau de mon palmarès, j’ai fait deux Jeux Olympiques. A Londres, j’ai fini 9 ème et à Rio, j’ai fini 5 ème sur le K1 200 mètres.

J’ai été double championne d’Europe, d’abord en 2015 sur le K1 200 mètres et en 2018 en K2 500 mètres avec ma partenaire Manon Hostens (LIEN).

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En France, j’ai été invaincue jusqu’à cette année. Pendant longtemps, je n’avais jamais été battue sur le 200 mètres. Par contre, sur le 500 mètres, il y a du monde et plus de challenge pour moi. Je vais essayer de remettre les pendules à l’heure lors de la prochaine saison (rire).

Les secrets du Kayak : Peux-tu nous raconter tes débuts en Kayak ?

Sarah Guyot : J’ai commencé très jeune, à l’âge de 10 ans. Tu sais, en Kayak, il y a plein de disciplines, tu as l’eau vive, l’eau calme, la mer

Personnellement, j’étais dans un club de randonnée polyvalent, on faisait un peu de tout. Ca m’a permis d’apprendre toutes les disciplines du canoë et du kayak.

Je n’ai vraiment commencé la course en ligne qu’à l’âge de 15 ans au lycée en centre d’entraînement régional.

Chez moi, on n’était pas très sportif. Mon frère faisait de la musique, moi je faisais plutôt des ateliers artistiques… On n’était pas trop dans le sport. Puis on a emménagé en Poitou Charente et mon frère a vu un club de Kayak pas loin de la maison et quand il nous a dit ça, j’ai tout de suite voulu essayer.

J’ai vraiment accroché car c’était différent de tous les autres sports qui sont en gymnase ou en Dojo, parce que j’avais essayé le Judo et le Basket et je trouvais ça trop scolaire, les sports un peu classiques.

Le Kayak, j’ai vraiment accroché avec le fait d’être dehors et d’être dans une sphère vraiment familiale où il n’y a pas beaucoup de monde mais où il y a toutes les générations qui se côtoient.

On était très accompagné et encadré ce qui m’a plu en plus du plaisir d’être sur l’eau, d’être à l’air libre.

Au début, je n’avais pas de préférence, j’aimais bien tout faire. J’ai été un an dans un club de Slalom mais par contre, je n’envisageais pas de ne pas faire de course en ligne.

Je ne concevais donc pas de ne pas faire de course en ligne mais cela ne me gênait pas de ne pas faire de Slalom. Toutefois, un peu de temps en temps, ca me plaisait.

Les secrets du Kayak - Le haut niveau

Sarah Guyot : Après je suis arrivée au club de Tours où là, c’était un club de course en ligne et là, je m’y suis mise vraiment beaucoup plus.

Au cours de ma jeunesse, j’ai déménagé plusieurs fois et été dans des villes où il n’y avait pas du tout de club ce qui fait que par période, je faisais beaucoup moins de Kayak.

J’ai fait une fois les régates nationales qui sont un peu les championnats de France des minimes, des 13-14 ans et quand je les ai fait, j’ai eu comme un déclic : C’était ca que je voulais faire.

J’ai alors intégré un lycée sport études afin de pouvoir m’entraîner tous les jours ce qui contrastait avec les périodes où je ne pouvais m’entraîner qu’une fois par semaine. Je sentais que c’était ma voie.

Quand on débute, on commence vraiment avec le club à deux séances par semaine, le mercredi après midi et le samedi. Dans mon club, on avait en plus les randonnées le dimanche ce qui peut paraître un peu plan-plan mais on apprend beaucoup dans une randonnée. On est longtemps sur l’eau en train de pagayer ce qui développe pas mal de choses.

Après il y avait les vacances, les petits stages où on pouvait se retrouver.

Comme mon frère en faisait et qu’il avait quatre ans de plus, on avait le droit de venir avec mon frère une fois de plus dans la semaine quelques années après. Je crois qu’on venait le mardi faire un petit entraînement en plus tous les deux.

J’ai eu la chance d’être dans un lycée sport études à Tours donc j’ai tout de suite eu les aménagements pour pouvoir m’entraîner tous les jours. Je terminais tous les mardis et jeudis à 16h et d’avoir le mercredi après midi de libre. J’allais donc tous les soirs à l’entraînement à partir de ce moment là avec parfois le temps de faire deux entraînements plus le week end.

On allait sur l’eau et parfois on enchaînait avec la musculation ou un footing.

Je ne sais pas ce qu’ils ont vraiment détecté à 15 ans. J’étais allée passer les tests pour rentrer dans ce centre d’entraînement.

Je me souviens qu’à l’entretien, ils m’avaient dit que mon niveau n’était pas assez bon mais je pense qu’ils avaient remarqué que j’avais envie. Ils ont du détecter cela car au test des tractions, je suis restée pendue ce qui est assez répandue parmi les jeunes filles.

Dans mon premier club, il n’y avait pas d’entraîneur, c’était des bénévoles qui maintenaient le Club. On faisait ce qu’ils nous disaient.

Après quand j’ai déménagé à Tours, il y avait un “vrai” entraîneur qui m’a appris plein de trucs. Mon frère fait aussi du Kayak de course en ligne, il fait les championnats de France, on monte parfois ensemble.

A partir de 15 ans, ma fréquence d’entraînement n’a fait qu’augmenter jusqu’à aujourd’hui où je suis entre 15 et 20 heures sur l’eau. En cycle de développement, on peut même aller jusqu’à 3 séances par jour.

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Dans mes souvenirs, je n’avais pas pour ambition de faire les Jeux Olympiques, ca me paraissait vraiment loin, très loin.

Toute petite, j’avais regardé les Jeux à la télévision et je me disais que c’était génial. Je découvrais que notre sport était Olympique. Mais je ne me projetais pas du tout là dedans, je ne connaissais rien au sport de haut niveau.

Je n’avais aucune idée de si je pourrais cela un jour. Je pense que je n’y pensais même pas.

Par contre, j’avais toujours en tête l’étape d’après ; le championnat départemental, le championnat régional, puis les inter-régions et enfin les championnats de France. J’ai vraiment toujours fonctionné étape par étape et je pense que c’est important de ne pas les bruler, de rester les pieds sur terre, de vivre dans le présent.

J’avais des posters dans ma chambre mais pas vraiment d’idoles mais je ne les suivais pas spécialement quand je les voyais.

On a commencé à me dire que j’étais forte, que j’avais du potentiel avant que je m’en rende compte. Par exemple, en junior, je n’étais pas très forte, j’étais dans les 6-7 meilleures françaises. Je me disais que c’était pas mal mais qu’il y avait quand même du monde devant mais comme on me disait que j’avais du potentiel, c’était stimulant.

Ca me donnait envie de toujours aller chercher la fille devant à l’entraînement.

Quand j’ai commencé à gagner les sélections équipe de France, j’ai commencé à penser que je pouvais faire des choses et puis surtout, niveau internationale, quand j’ai eu mes premières médailles européennes, je commençais, à ce moment, à créer, à écrire ma place.

J’ai encore des choses dans le palmarès qui me manquent. En gros, à partir de 20 ans, j’ai commencé à être niveau national.

Il m’a fallu environ 10 années de pratique pour atteindre le “haut niveau”, même si je ne compte pas vraiment les cinq premières années car c’était vraiment du loisir.

Quand j’ai commencé la course en ligne, le 200 mètres n’existait pas (Il est apparu aux Jeux Olympiques de Londres en 2012). Par contre, il y avait du 500 mètres et même du 1000 mètres qui n’existent plus aujourd’hui chez les femmes.

En championnat de France, je faisais le 500 mètres et le 5000 mètres, ce dernier étant plus compliqué pour moi.

Je me souviens aussi sur le 1000 mètres avoir fait une finale C à un championnat de France. A l’inverse, quand le 200 mètres est arrivé, j’ai vite vu que j’avais le profil “sprinteuse”.

Ma toute première coupe du monde, c’était en France, à Vichy en 2010, en prévision du championnat du monde 2011 qui a failli avoir lieu sur le même bassin. J’ai participé en K4 500 mètres. Tout était nouveau pour moi, l’équipage, l’équipe de France, la grosse compétition…

J’avais pas mal de pression mais j’ai été super bien briefée pour cette première course dans le sens où je ne devais pas venir pour faire quelque chose d’exceptionnelle.

J’étais Senior 1 et quelques mois auparavant, je n’étais pas sélectionnée en équipe de France, je ne suis pas passé par la case -23 ans donc j’ai fait directement un gros bond. On était là pour créer, j’étais dans le K4 avec Marie Delattre qui avait été médaillée Olympique à Pékin. J’étais là pour faire du mieux possible.

Ca a été une super expérience car chaque course a été meilleure que la précédente (série, demi-finale, finale) et on finit 6 ème en finale donc super course.

Ca m’a sur-motivé pour la suite car on ne croyait pas trop dans notre bateau où on était des jeunes qui débarquaient, ce bateau était vraiment une création où on partait de zéro. Clairement, personne n’en attendait grand chose et cela a perduré un petit moment malgré des résultats prometteurs.

Aussi bien en mono, qu’en K2 et K4, j’ai fait des super courses et il est difficile pour moi d’avoir une préférence car j’aime vraiment les trois.

J’aime surtout quand ca se passe bien, quand j’ai des sensations de dingues et l’avantage de l’équipage, c’est que tout est démultipliée même si en monoplace, tu es contre toi-même donc je ne peux pas te dire que j’ai une préférence. J’aime bien tout mais j’aime surtout réussir.

J’ai vécu pas mal de changement en équipe de France où il y a quelques années, c’était vraiment la guerre. J’ai connu des années où entre les filles, c’était la guerre mais vraiment et c’était pareil chez les garçons. Les entraînements, c’était devant !

Ca fait progresser mais c’était aussi épuisant. C’était dur à vivre au quotidien.

L’ambiance a changé quand on s’est mise à faire beaucoup d’équipage où on s’est rendu compte qu’on était un peu bête à se tirer dans les pattes plutôt qu’à se soutenir, à se tirer vers le haut. Ca a évolué tout doucement et maintenant, on est une équipe vraiment très soudée. Je pense que c’est pour ca que ca marche de mieux en mieux chez les filles.

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Les secrets du Kayak : En quoi consiste les séances en Kayak ?

Sarah Guyot : En fait, on a plusieurs intensités. On a l’EB1 qui est de l’aérobie à basse intensité ce qui peut correspondre à faire un footing, pour moi, à 10 km/h. On fait entre 1h et 1h30 quand c’est du volume.

L’EB1 regroupe aussi toutes les séances où l’on va faire des éducatifs techniques, des exercices de stabilité, de placement de la pagaie, des mains…qui permettent d’être à l’aise dans le bateau.

L’équilibre est tellement difficile dans le bateau qu’il faut toujours l’entretenir, même quand on fait du Kayak tous les jours.

EB, c’est endurance de base.

Après, on a EB2 qui correspond à des séances de capacité aérobie et de puissance aérobie. On parle aussi de cadences à cette intensité et on est entre 70 et 90 coups de pagaies à la minute.

Ensuite, on a la ZT où on est vraiment à 90 coups de pagaies à la minute.

En EB2, quand on est sur des séances de puissance aérobie, on est sur des intervalles d’une à deux minutes et sur de la capacité aérobie, on va plus être sur des 4, 5, 6 minutes et plus.

C’est un type d’effort où je ne me connais pas trop bien car je n’en fais pas souvent.

Des EB2, on en fait une à deux fois par semaine.

L’effort au dessus, c’est l’EC, l’endurance de course. Pour moi, ca va être de la préparation de 500 mètres. Ca va être de découper le 500 mètres dont des 200, des 300 mètres ou encore l’effort de type VMA, comme en course à pied, des 30/30, du travail intermittent.

Au niveau de la cadence, on y fait moins attention car l’hiver, avec l’eau froide, c’est plus dur de tenir les cadences mais on vise entre 90 et 110 coups de pagaies par minute si on est vraiment en forme l’été.

Il peut m’arriver de changer la longueur de ma pagaie pour travailler plus ma fréquence ou mon appui. On dit d’ailleurs, l’hiver, comme on travaille beaucoup l’appui que l’on fait de la musculation embarquée.

C’est quelque chose que j’ai beaucoup travaillé ces dernières années car on peut avoir l’impression d’aller super vite, de mouliner beaucoup sans mettre la pale dans l’eau.

Après, on a la vitesse, ce que l’on fait au moins une fois par semaine. Ca va être des sprints sur 10 secondes, 15 secondes, entre 8 et 10 séries à chaque fois, à fond la caisse.

En clair, on fait surtout de l’EB1 même si ca reste les séances qui passent en second, souvent l’après midi, qu’on découpe parfois jusqu’en tranche de 2 minutes si on veut travailler un aspect technique.

On peut aussi faire des 10 minutes, voir des pyramides, quelque chose qu’on aime bien en Kayak comme un 2/4/6/8/10/12/14 et après tu redescends. Quand c’est vraiment des grosses aérobies, on va jusqu’à 15-20 minutes quand on veut faire une séance longue et à basse intensité.

Il y a quelques années, ce type de séance me faisait peur devant sa longueur mais maintenant j’aime bien. Je vais toutefois moins me focaliser dessus car j’ai l’impression d’avoir plus de mal à sprinter si j’en fais beaucoup comme ces 2-3 dernières années.

Ce que je préfère, ce sont les séances de vitesse endurance, quand on est sprinter, pour préparer le 200 mètres où on va faire des 100, des 150 mètres ou même des 200 mètres, un peu comme des chronos. Une séance type, ca va être un 200, un 150, un 100 et enfin un 50 mètres avec beaucoup de récupération entre chaque. Le but, c’est d’aller le plus vite possible et ca, j’adore.

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On travaille aussi les départs sur 3-4 coups de pagaies, notamment la position, pour être le plus efficace possible.

Les séances que j’aime le moins, ca va être les ZT ou les capacités aérobie, là où l’effort est assez long. Et plus c’est long, plus c’est dur car je sais qu’il faut que je tienne. J’ai du mal à gérer mon intensité parce qu’au début, je me sens super bien alors j’ai envie d’y aller mais il faut que je me “contrôle” sinon mes pulsations montent à fond et je congestionne.

Ca a été un objectif pour moi d’apprendre à gérer ce type de séance.

Je ne fais pas souvent d’ergomètre, même si j’en ai fait pas mal cette année durant le confinement, mais sinon ces dernières années, j’en faisais avant l’hiver. J’aime bien si quelqu’un peut me faire un retour en direct sinon je m’ennuie dessus.

Les secrets du Kayak : L’importance de l’entraîneur

Sarah Guyot : Pour moi, c’est indispensable d’avoir un entraîneur. Je ne pense pas que j’en serais arrivée là où j’en suis actuellement sans entraîneur et même encore aujourd’hui, c’est le regard extérieur qui me permet de continuer à progresser.

Personnellement, j’ai besoin d’énormément d’échanges, de discuter, de mettre des mots sur ce que je fais.

On fait parfois de la vidéo aussi, notamment quand je fais un truc, qu’on me fait un retour et que j’ai besoin de voir ce que je fais.

Je me suis longtemps entraînée avec le même entraîneur qui s’appelait Nicolas Maillote jusqu’à Rio et après j’ai changé plusieurs fois pour des raisons de logistiques. Actuellement, mon entraîneur référent, c’est Frédéric Rebeyrol et je voulais que ce soit lui, car il va être l’entraîneur de la catégorie dames aux Jeux Olympiques de Tokyo.

C’est pour cela que j’ai du contact avec lui au quotidien pour ne pas se retrouver uniquement lors des courses internationales où il ne pourrait pas savoir tout un tas de choses sur moi qui sont quand même importantes pour le jour de la course.

Après comme il est à Toulouse et que je suis à Paris, je suis obligée d’avoir quelqu’un au quotidien à Paris. C’est là que j’ai changé plusieurs fois et notamment, cette année, depuis septembre, c’est Yann qui est aussi mon copain. Pour l’instant, ca se passe bien, c’est cool.

On avait déjà testé il y a quelques années et on avait vite arrêté car on n’avait pas trouvé le fonctionnement et là, au fil des années, Yann a compris comment je fonctionnais et donc ca fonctionne plutôt très bien.

Rien ne m’oblige à rester à Paris sauf que mon compagnon est là bas. Il y a aussi l’INSEP et un cadre où il y a des choses qui me sont utiles comme un staff médical, la réathlétisation, la natation… alors qu’à Toulouse, tout n’est pas réuni au même endroit.

Surtout qu’actuellement, je vais à la réathlétisation tous les jours.

Les secrets du Kayak - L’entraînement en dehors du bateau

Sarah Guyot : En PPG, on a le choix des séances d’aérobie.

Personnellement, je fais beaucoup de footing car j’adore ça. Certains font plus du vélo que de la course à pied. C’est plus un choix personnel.

On fait 3 séances de musculation par semaine. On alterne beaucoup entre de la force max, de la puissance où on va travailler la vitesse de barre, soit de la musculation résistance où on va faire des circuits d’exercices, en général trois sur un nombre de répétitions autour de 10-15 répétitions.

On ne fait plus de séance de musculation endurance comme on faisait auparavant.

Avant, il y avait les tests sur deux minutes au développé couché et au tirage planche mais maintenant, il n’y en a plus. Il y avait aussi des tests de course à pied.

Désormais, on fait ces tests entre nous. On fait régulièrement des tests de force max, de maximum de répétitions à 80% et notre fameux test des 2 minutes où il s’agit de faire un maximum de répétitions.

Je ne fais plus de développé couché depuis des années parce que cela me faisait mal aux épaules. Je fais des écartés latéraux à la place. Mon max au développé couché est de 97.5 kg et au tirage planche, il est à 95 kg.

Et mon max aux tractions, c’est 20 répétitions.

On s’est mis à l’entraînement des cuisses depuis quelques années, à faire du renforcement. On est encore loin de l’équilibre corporel au profit du haut. Après, il y a plusieurs écoles dans le monde comme les Hongrois pour qui c’est du poids mort et qui ne les travaillent pas et au contraire, tu vas avoir La Nouvelle Zélande où les filles font énormément de musculation du bas du corps.

Pourtant, je te parle des deux meilleures nations du monde ce qui fait qu’ il n’y a pas vraiment de règles.

Nous, on s’y est mis pour l’équilibre du corps et notamment pour être fort des fessiers afin d’être plus stable du tronc. Je trouve que ca m’aide plus que de travailler les quadriceps et les ischio-jambiers.

Quand je fais 3 semaines de ski de fond et que je retourne dans mon bateau en février, j’ai l’impression qu’il est trop petit. Je suis obligée de bouger mes calages.

Les secrets du Kayak - L’environnement pour progresser

Sarah Guyot : J’ai essentiellement été en Nouvelle Zélande pour faire des stages l’hiver où j’ai appris énormément de choses en 6 semaines.

Ca ne m’a pas fait progresser tant que ca mais ca m’a donné des réponses à mes questions. J’y pense très souvent et je comprends maintenant pourquoi elles font ci ou ca.

J’ai découvert des choses surprenantes. Par exemple, elles font deux fois par semaine des séances d’aérobie assez longues et Lisa Carrington, qui est la meilleure sprinteuse du monde et qui en plus, n’a jamais été battue, et elle fait énormément d’aérobie. Ca m’interroge encore parce que quand j’en fais, je suis clairement moins bonne en vitesse.

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Aussi, en musculation, elles ne font que deux séances par semaine mais elles bombardent. Elles sont très fortes. Les séances que j’ai faite avec elles étaient surprenantes car elles font un peu de tout dans la séance : De la force max, de l’explosivité, de la résistance et parfois même un peu d’endurance. C’était une découverte pour moi.

Après je pense qu’il y a un équilibre à trouver dans le ratio vis à vis des séances aérobies. C’est une piste en tout cas.

Elles, elles le gardent jusqu’aux courses ce qui est surprenant. Je me rappelle, c’était leurs sélections et le samedi d’avant, elles sont allées faire un 20 km.

Par contre, elles ne font pas de course à pied. Que du Kayak et de la musculation et énormément d’éducatifs sur l’eau, genre des séances de 45 minutes où tu as l’impression de ne rien faire, où on fait des habiletés pour être à l’aise dans le bateau.

Ca, c’est pas la séance de la journée, c’était la deuxième ou la troisième mais grâce à ca, le lendemain, tu es frais et disponible pour faire une grosse séance.

On s’entraînait sur le lac Pupuke à Auckland où le bassin est assez pourri et je me rappelle ma première séance, je sortais de l’avion, j’avais du décalage horaire et j’ai cru que j’allais tombé à l’eau. Et en fait, elles faisaient des petits aller-retour sur 8 minutes à l’abri mais par contre, les 20 km, elles les font dans la marina.

Leurs installations sont très basiques alors qu’on pourrait s’attendre à autre chose vu leurs niveaux.

Mon entourage actuel s’est fait naturellement par rapport à mon cours de vie où mon copain évolue dans le kayak, beaucoup de mes amis sont dans le Kayak parce que mon rythme de vie est ainsi fait et laisse peu de place à autre chose.

Les secrets du Kayak - Le choix du matériel

Sarah Guyot : Je suis en Plastex car je me sens super bien. J’ai un Fighter 2009 qui est un modèle assez vieux mais j’arrive vraiment à bien m’exprimer dedans en sprint.

J’ai déjà essayé Nelo, j’ai déjà “couru” dans un Vanquish 3 et je ne me sens pas bien. Heureusement qu’il y a Plastex pour moi.

Je pense même que beaucoup de monde pourrait être bien en Plastex mais Nelo a tellement le monopole que certains athlètes ne réfléchissent pas, n’essayent même pas. C’est comme les dernières chaussures de je ne sais quelles marques, par principe, ils les prennent.

C’est assez difficile d’essayer des bateaux mais comme je suis dans la Team Plastex, dès qu’ils sortent un bateau, ils m’en amènent un pour que je l’essaie.

Braca et Jantex sont les deux grandes marques de pagaies. Personnellement, je suis en Jantex. Après les formes, il y en a beaucoup qui sont les mêmes. Je trouve que tu as un peu le touché Jantex et le touché Braca dans les sensations. Si tu me mets l’une ou l’autre dans les mains, je vais savoir te dire laquelle c’est. Je suis en Gamma tout court en 2m14 en manche fixe et je vais me mettre en 2m14.5. Je suis en 740, la Gamma medium.

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Depuis que la Gamma Rio de Jantex est sorti, tout le monde est en Gamma Rio et moi, tous les ans, je la réessaye parce que j’en ai une chez moi et elle me parait trop grosse alors que c’est la même surface. Mais comme elle prend plus d’eau à cause de sa forme, je n’arrive pas à m’y faire. C’est vraiment le petit palier qui est trop difficile et je m’enroule dessus.

Il y a un modèle un peu plus petit qui est sorti mais je reste avec la mienne avec laquelle je suis très bien.

Les secrets du Kayak - Tes blessures en Kayak

Sarah Guyot : J’ai eu des lumbago à répétitions cet été, j’en ai un peu chié. Ca fait environ un an que ca traine.

Pour te dire, il y a un jour où j’ai poussé un frigo et ca m’a fait une petite douleur dans le dos comme ca arrive régulièrement sauf que depuis ce jour là, dès que je suis assise dans les transports, je suis toujours mal après. Je supporte de moins en moins bien tous ces trajets, le fait d’être assise mais mal assise, d’être inactive. Ca ne fait que se dégrader et le voyage en Australie, clairement, ne m’a pas du bien.

Et cet été, je me suis fait 3 ou 4 lumbago et je n’ai pas courir la coupe du monde à cause de ca. C’est la première fois où ca m’empêche de faire un effort. Ce n’est pas facile psychologiquement.

Au championnat de France de cette année, j’ai eu un torticolis qui m’a empêché de participer aussi. C’est lié au dos, c’était bizarre aussi car ca a duré presque trois semaines. C’est venu puis c’est reparti. Ce n’est pas une vraie blessure comme le dos.

En ce moment, je fais un cycle de réathlétisation à l’INSEP. Je découvre plein de choses en plus de mes connaissances en kinésithérapie et je pense que ce qui m’aide vraiment, c’est ce que je te disais tout à l’heure, c’est le renforcement de mes fessiers où je pense qu’ils ont un rôle à jouer dans le maintien du bassin et il y a aussi évidemment le gainage et la position assise comme pour tout le monde qui est super mauvaise.

On pourrait croire que le Kayak, c’est pas top mais on est en activité, on est gainé, il y a de la rotation donc pour moi, le Kayak n’est pas traumatisant pour ca mais c’est vraiment être assis sur un siège, là, je pense que c’est vraiment pas bon.

C’est quand même complexe, car même en étant Kiné, en ayant les ressentis, j’ai du mal à comprendre pourquoi ca revient, pourquoi ca met autant de temps.

J’ai un super gainage mais je pense que c’est quand même une question d’équilibre. Quand tu es très fort du haut du corps et qu’on a les fessiers tout raplapla qui fonctionnent mal, c’est toujours le haut du corps qui va prendre, comme si le corps était en surcharge et ca, il n’apprécie pas.

Je pense que c’est important d’avoir un équilibre corporel à tous les niveaux afin que le haut du corps soit plus à l’aise afin qu’il soit plus relâché. Cela permet de jouer sur la prévention des blessures mais aussi dans la transmission des forces dans la pagaie.

Sinon, ca va de mieux en mieux. Je n’ai pas encore atteint des intensités élevées mais je suis remontée sur l’eau avec siège rotatif. Il y a quelques athlètes qui sont avec un siège rotatif, notamment ceux qui ont eu mal au dos qui passent par là. La rotation se fait toute seule, sans effort ce que je n’apprécie pas. Si je pouvais ne pas mettre de siège tournant, je l’enlèverais tout de suite.

Le problème est qu’il tourne très vite et comme je me sers beaucoup de la poussée de jambes, alors dès que je pousse, ca fait tourner le siège ce qui me fait perdre en sensations à ce moment là. J’ai l’impression que l’énergie qui va dans le siège dans la rotation va moins dans le bateau pour avancer. Je sens beaucoup moins l’accélération, beaucoup moins de choses dans le bateau ce qui est moins agréable.

Mais c’est vrai que ca enlève complètement l’espèce de porte à faux, ce qui fait que si le dos est pas hyper gainé, ca me fait mal. Donc pour le moment, je suis en siège tournant. Ca tourne plus vite que la poussée de jambes naturelles.

Les secret du Kayak - L’hygiène de vie

Sarah Guyot : Je suis une siesteuse, je fais pas mal de sieste, pas tous les jours. En stage, par contre, c’est tous les jours mais au quotidien, ca m’arrive de ne pas en faire.

Quand je fais deux séances dans la journée, je m’arrange pour faire une sieste entre afin d’être en forme pour la séance de l’après midi.

Je fais parti des athlètes qui mangent bien. Je mange vraiment équilibré avec beaucoup de légumes mais je m’autorise pas mal d’écart, je mange du chocolat, je mange du fromage, je mange du beurre de cacahuètes. Par contre, je ne vais pas manger de chichi ou des gaufres. Je me fais quand même pas mal plaisir tout en étant assez vigilante au niveau micro-nutritionnel.

Je prends un peu de spiruline au petit déjeuner dans mon bol, un peu d’acérola quand j’y pense. J’essaie de me mettre aussi aux protéines végétales, après j’ai du mal avec tout ce qui est en poudre.

J’essaie aussi de ne pas trop manger de viandes car j’ai l’impression que lorsque j’en mange souvent, cela me fatigue.

J’ai découvert la méditation dans ma préparation pour les Jeux Olympiques de Rio. J’en fais soit toute seule en autonomie, soit avec une application qui m’aide à rester centrer. Cela m’aide à développer mon attention.

Je pense toujours à ma technique, ma réflexion ne s’arrête jamais mais je ne fais pas de visualisation.

Par contre, je fais de la préparation mentale depuis 6-7 ans. Je ne suis pas très assidue mais ca fait très longtemps que j’en fais un petit peu.

Les secrets du Kayak - Tes objectifs

Sarah Guyot : Je ne suis pas encore qualifiée pour les Jeux Olympique de Tokyo. On a qualifié le K4 500 mètres. On saura au mois de mai la composition de l’équipe.

Pour se qualifier, il faut deux choses. En coupe du monde, il faut qu’on gagne et si on ne gagne pas, la fédération se réserve le droit de changer les équipages, sachant que pour les composer, il y aura les Open de France où il faudra être bonne, au moins être dans les 4 premières. Je vise plus que les quatre premières.

Il n’y a pas de conditions de chronomètre car les conditions sont tellement changeantes, notamment à Vaires sur Marne que l’on ne peut pas se fier à ça.

Au fil des années, c’est peut être bizarre, mais moins je me sens fatiguée. Ma récupération est aussi beaucoup plus efficace. Je mange mieux qu’il y a 10 ans, j’ai plus le temps de dormir, j’ai plus le temps de récupérer parce que j’ai fini mes études.

L’avantage de ma situation professionnelle, c’est que j’ai le temps de faire des choses pour mieux récupérer. Je sens que je suis beaucoup moins fatiguée qu’il y a 6 ou 7 ans où j’étais tout le temps dans le dur.

Mon premier objectif pour Tokyo, ce sont les équipages en K4 et en K2. On a fait 5 et 4 ème l’année dernière donc si on peut grappiller quelques dixièmes pour aller chercher le podium, ce serait dingue ! Il y a beaucoup de densités en terme d’équipe ce qui peut changer en notre faveur ou défaveur suivant le jour.

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