Interview : Patrick Lefoulon

Ceci est une retranscription écrite du podcast enregistré avec Patrick Lefoulon en mai 2021.

Les Secrets du Kayak - Comment vas-tu aujourd’hui ?

Patrick Lefoulon : Ça va bien, professionnellement c'est un peu compliqué mais on-fait face.

Les Secrets du Kayak : Quand et comment as-tu commencé le kayak ?

Patrick Lefoulon : J'ai débuté en 1970-1971, par une connaissance de mes parents, adhérent du club de Mantes.

Mon premier éducateur, était médaillé olympique, Jean-Louis Olry. Médaillé en slalom en 1972 à Munich.

Avant ça j'avais pratiqué un peu de gymnastique, un peu de football. Je n'étais pas issue d'une famille sportive, mais je touchais à tout.

On apprenait toutes les disciplines en kayak, une de mes premières sortie c'était en slalom, à côté de Mantes sur l'Eure, j'y ai pris quelques bains honorables.

Géographiquement, on bénéficie d'un environnement qui nous porte d'avantage sur l'eau calme que sur l'eau-vive, donc j'ai plutôt pratiqué la course en ligne naturellement.

Mais j'ai fait des championnats de France de slalom, de descente comme cadet, avant de me spécialiser définitivement.

Je ne pense pas que ça permet de performer en course en ligne mais c'était de la découverte.

Il fallait en faire, mais à mon avis ce n'est pas une nécessité pour atteindre le haut niveau.

Ca fait partie de la culture du kayakiste que de savoir ce que c'est.

En minime et cadet, je faisais deux à trois entraînements par semaine.

En cadet 2 s'est ajoutée la préparation physique, la musculation et le footing.

En junior, je faisais cinq entraînements par semaine.

Il n'y a qu'une fois arrivé en senior que je me suis entraîné tous les jours.

Enfant, à douze-treize ans, j'avais quelques prédispositions par rapport aux jeunes avec qui je m'entraînais. J'avais plus de force musculaire, et une explosivité musculaire supérieure.

J'ai du faire mes premières compétitions internationales en cadet 2, en Allemagne à Borkum et en Belgique à Gand.

En cadet 2, on mangeait des wagons, on était clairement pas au niveau des allemands ou des polonais. Il fallait s'accrocher !

Je n'avais pas du tout pour projet à quatorze ans que d’être champion en kayak.

En Minime, j'étais champion de France, donc en cadet c'était logique d'accrocher une bonne place.

En junior pareil. Et une fois arrivé à l'INSEP, pourquoi pas arriver aux championnats du Monde et aux Jeux Olympiques.

A quatorze ans, je souhaitais juste avoir un diplôme pour travailler et me faire plaisir en compétition, avec de bonnes performances.

L’objectif des Jeux est arrivé à vingt ans à l'INSEP.

En cadet 2, ce qui m'a permis de rester motivé face à la raclée, c'est ma personnalité. Je suis resté motivé tout au long des échecs.

Il suffit de s’entraîner, de le vouloir, et un jour ça vient. Abandonner n'a jamais fait partie de mon mode de pensée, et c'est aussi ce que j'ai appris à mes enfants.

J'ai fait les Jeux de 1980 à Moscou, on avait fait quelques compétitions internationales. J'avais accroché les allemands de l'est et les Russes qui dominaient avec les hongrois.

Je m'étais dit que j'allais pouvoir vraiment concourir avec c'est gens là. Donc c'est à 22 ans, que j'ai vu que c'était possible d'aller chercher une finale de championnat du monde ou de JO.

J'avais la réputation de quelqu'un qui s’entraînait beaucoup, beaucoup de kilomètres. Parfois des sorties de 25 km.

En minime et cadet c'était des entraînements plaisir, mais dès cadet 2, junior 1 et 2 j'avalais des quantités d’entraînement colossales avec des séances qui ne se font plus.

Ça m'est déjà arrivé de faire 52 km en une journée. J'étais dans le quantitatif et non pas le qualitatif. On s’entraînait une fois par jour mais sur des séances très longues.

Et une fois arrivé à l'INSEP, on faisait deux séances par jour, plutôt des séances d'avantage qualitatives.

On était champion K2 10000m avec Bernard Brégeon en 1982. Le marathon n'existait pas, c'était ça la course de fond.

On faisait quatre à six milles kilomètres par an, en plus de la PPG. Toujours en course en ligne. 98% du temps en monoplace et 2% du temps en équipage.

A l'époque en terme de distance le 200m n'existait pas. Les disciplines olympiques c'était 500m et 1000m. On ajoutait le fond en championnat du monde.

Je suis allé à l'INSEP en junior 2, j'étais champion de France junior, c'est moi qui ai fait la démarche de demander pour y entrer.

Moi j'étais étudiant en médecine à l'époque. Ça dénotait un peu par rapport aux autres pensionnaires. On était quelques étudiant d'études supérieures, et j'étudiais au CHU de Créteil à Henri-Mondor en même temps que je m'entraînais.

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Les Secrets du Kayak : Quand tu rentres à l'INSEP en même temps que tes études de médecine, est-ce que tu t'es dit que les études seraient un frein pour le kayak ?

Patrick Lefoulon : Pour moi, les deux étaient indissociables.

J'ai parfois priorisé mes études surtout les années post olympiques, et des années où j'ai priorisé le sport notamment les années olympiques.

Le tout étant d'avoir un cursus universitaire cohérent, juste rallongé de deux ans la durée de mes études, soit dix ans au lieu de huit.

J'avais la réputation de faire des séances très longues. Systématiquement, je rajoutais cinq ou dix kilomètres par rapport à Alain Lebas, le leader de l'équipe.

Pareil pour le footing, il faisait 50 minutes, je faisait 1h15. J'étais Monsieur Plus.

Je ne faisais pas que les entraînements collectifs, je montais à 7h sur l'eau pour ensuite rejoindre mon stage à l’hôpital.

Et le soir j’enchaînais les cours avec une séance de musculation à 19h.

Les trois quarts de mes entraînements étaient individuels.

J'étais assez fier de cette réputation.

Mes entraînements étaient rudimentaires par rapport à aujourd'hui. J'avais un entraîneur qui me conseillait avec Jean-Claude Le Bihan, puis Alain Lebas qui était passé d'athlète à entraîneur, qui m'a entraîné pour l'olympiade 1980-1984.

On n'était pas pris en charge comme maintenant. Il fallait se connaître, avoir des connaissance sur la préparation physique, il fallait être autonome.

Aujourd'hui, l'athlète quand il décide de s’entraîner appelle son entraîneur pour connaître sa séance. Avant ça n'existait pas, on anticipait et on se prenait en charge.

Mais à l'époque les entraînements qualitatif, on ne les avaient pas. Nous c'était du quantitatif.

Les Secrets du Kayak : Comment faisait-on pour savoir comment s’entraîner à l'époque ?

Patrick Lefoulon : On écoutait les conseils des entraîneurs. On échangeait entre nous. On a tout découvert sur le tas, on partait de zéro dans les années 1970.

On lisait ce qui paraissait sur les entraînements, mais par rapport à ce qui existe aujourd'hui, c'était du bricolage.

Il y avait des stages en Europe, dans les Antilles, certains sont allés en Asie, en Chine. Moi pour les études c'était plus simple d'aller en Pologne, Italie, Hongrie, Espagne.

On en faisait deux ou trois par an.

On s'entraînait avec les équipes de chaque pays sur place, sauf en Italie, et en Espagne.

Mais pour les pays de l'Est on avait des stages très profitables où on pouvait comparer nos entraînements avec les leurs. On a beaucoup appris et même nos entraîneurs ont beaucoup appris.

Je me disais que peut être j'en faisais trop. Je me remettais en question, mais comme beaucoup d'athlètes, il y a des moments de doute.

On cherche à comprendre pourquoi ça marche chez les autres et pas pour soit.

Je n'ai jamais connu le syndrome du surentraînement. Ou bien j'ai du rapidement le surmonter.

J'ai cependant eu une grave blessure à l'épaule, un an avant les Jeux de Los Angeles, j'ai du me faire opérer onze mois avant les Jeux.

Ça été compliqué à gérer. Je suis descendu très bas, il a fallu remonter. Le Staff de l'époque ne m'a pas aidé. Je leur en ai un peu voulu.

Il a fallu que je gère cette blessure grave. C'était une lésion du bourrelet glénoïdien, ça arrive souvent chez les kayakistes, les nageurs et les lanceurs de javelot.

La médaille d'argent à Los Angeles relève du miracle !

Du coup l’arthroscopie arrivait tout juste en France, j'ai fait parti des premiers à en bénéficier. Ils m'ont retiré le bourrelet et le corps étranger cartilagineux qui était dans l'articulation.

C'est une lésion qui est apparue brutalement, c'est venu d'un coup. C'était en stage à Séville, sur un départ, l'épaule s'est bloquée, ça va que j'étais en K2 et pas en K1 ! Mais tout fini bien.

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Mais ce n'était pas mes premiers Jeux. Les premiers c'était à Moscou, c'était inoubliable.

Le contexte politique de l'époque était particulier. Il y avait un boycott des pays occidentaux contre l'URSS au sujet de l'invasion contre l'Afghanistan, on ne devait pas y aller.

Sauf qu'un certain nombre de comités olympiques ont décidés de passer outre cette décision. Et une délégation à été envoyée à Moscou.

Au final nous y sommes allés, c'était un soulagement. Et on a passé des jeux très bien organisés, à la méthode soviétique, c'est à dire avec une rigueur et une discipline à toute épreuve.

C'est un excellent souvenir malgré le contexte politique qui a noirci les Jeux. J'ai fait le K1 500m j'ai loupé de peu la finale, on a fait le K4 1000m et on a finit sixième, après être resté tout du long de la course en troisième place. On s'est fait passé par deux bateau dans les cinquante derniers mètres.

Il y avait bien des courses de sélection qui se faisaient à Choisy-le-Roi, pour les plus anciens.

Puis il y avait trois épreuves sur trois semaines, il n'y avait que neuf personnes à chaque fois au départ.

Et à partir de ça était arrêté un collectif pour faire les régates internationales. Il y avait moins de rigueur qu'aujourd'hui, moins formaté, mais oui il y avait des courses de sélections.

Il y avait aussi un circuit de coupe du monde non officiel avec quatre ou cinq courses, majoritairement dans les pays de l'Est (Roumanie, Allemagne de l'Est, Russie et Hongrie).

C'était des courses où il fallait se monter par attirer l'attention des sélectionneurs et être retenu pour les championnats du monde. Mais ce n'était pas officiel comme aujourd'hui.

Après Moscou, je suis sorti en me disant que je serai champion olympique !

Alain Lebas m'a inspiré, je n'étais pas loin de lui. J'ai redoublé d'énergie à l'entraînement. J'ai essayé d'être plus qualitatif et moins quantitatif.

Les Secrets du Kayak : Et au niveau de la préparation physique et de la musculation, tu te préparais aussi à la débrouille ?

Patrick Lefoulon : Oui c'était du bricolage, mais efficace, on avait des forts au sein de l'équipe.

On recherchait la force musculaire, et des circuits training pour faire du cardio.

On découvrait ça, on allait voir ce qu'il se faisait à l'aviron et dans d'autres sports. On s'en inspirait.

Donc développé couché, tirage planche et traction, des séances d'abdominaux à en sortir cassé. On faisait du dynamique alors qu'aujourd'hui les athlètes font du statique.

On ne faisait pas les jambes, mais j'étais un très bon coureur. Et j'affirme qu'aujourd'hui les coureurs ne savent plus courir.

Certains me choquent aujourd'hui. Je suis surpris que la course à pieds ait été abandonnée par les athlètes. Cela doit s'expliquer certainement, mais le cardio est très important. Ils n'ont même pas de foulées ! C'est peut-être volontaire.

La course à pied m'a vraiment permis d'être performant, surtout quand tu fais des efforts d'aérobie.

Alors oui aujourd'hui il y a l'épreuve du 200 m qui est un effort en anaérobie lactique, mais c'était important le footing.

On faisait des footings avec Pascal Boucherit mémorables. C'était au premier qui mourait, il fallait partir vite, et se donner à fond. Je crois que sur 3000 m j'étais à 9-10 minutes. Sur un 1000 m je faisais 2'30-35''. On était tous très bon.

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Les Secrets du Kayak : Comment se passe la préparation entre les Jeux de Moscou et ceux de Los Angeles ?

Patrick Lefoulon : Il n'y a pas de championnat d'Europe à l'époque, c'est arrivé après 1984.

C'était les championnats du monde qui avaient lieux en Europe quasiment tout le temps, c'est après qu'ils les ont émigrés en Amérique.
J'ai fait une très bonne place aux championnats du Monde en K1 500m à Nottingham, quatrième, à deux dixième de la médaille.

Et après, j'ai fait champion du Monde en K2 avec Bernard à Belgrade.

En 1983 on a fait avec Bernard, lors d'une tempête ce jour là en Finlande, sixième ou septième. Le bassin n'était pas équitable, les lignes étaient tirées au sort, alors qu'aujourd'hui c'est en fonction de tes résultats des demi-finales.

Et ensuite aux JO Médaille d'argent. Après une saison 1984 très difficile suite à mon épaule.

Mais j'avais réussi le passage des sélections en équipe de France. Au niveau international, j'ai quand même bien régressé suite à cela.

D'où le choix du K2 1000m car le K1 ce n'était pas possible de performer au niveau de la médaille.

Le staff ne misait même pas sur nous ! Mais la course s'est bien déroulée, c'était inespéré.

Les JO de Los Angeles comparés à Moscou, c'est qu'à Moscou nous étions dans le village olympique. Aux Etats-Unis on était dans un village olympique qui était à deux heures de voiture, sur le lac Casitas.

Un petit village olympique créé dans une petite université au Nord de LA, il n'y avait que l'aviron et le kayak. Il n'y avait pas l'ambiance olympique qu'on a vécu à Moscou. C'était un peu décevant.

C'est pour ça qu'après avoir gagné on était content de rejoindre le village olympique à LA et participer à l'ambiance.

Los Angeles ça fait 200km de long pour 100km de large. Donc on était loin de tout ça. Ça nous a permis de rester concentrés sur les épreuves, mais on était frustrés.

C'était les canadiens qui ont gagné la médaille d'or, et c'était tellement beau l'argent, qu'on ne s'est pas demandé ce qu'il aurait fallu faire pour obtenir l'or.

On était tellement heureux d'être avec eux sur le podium et d'être sorti de toute ma galère. L'argent a suffit à mon bonheur.

Quand tu es vice champion olympique, le comment gérer une vie normale à ton retour en France est une réelle question importante. C'est compliqué.

Pour moi il fallait me consacrer à la fin de mes études, et à ma famille puisque je venais d'être papa.

Mais ça m'a manqué, plus d'une fois j'ai voulu reprendre pendant deux trois ans. Et je me suis raisonné. J'avais d'autres challenges à relever. Toute cette ambiance d'entraînement, de compétitions et de stages me faisait envie.

Et puis la vie normale a repris le dessus. Mais ce virage tout le monde ne le réussit pas et je le comprends. J'ai vu des athlètes partir en vrille après leur carrière de haut niveau parce qu'ils n'ont pas su trouver d'autres challenges à relever.

Cette médaille c'était pour moi l'aboutissement d'une carrière sportive, même si le DTN de l'époque voulait que je poursuive. J'avais le palmarès le plus respectable !

J'ai tourné la page à 26 ans, donc c'est tôt. Mais il fallait penser à sa carrière professionnelle, sa famille etc.

A mon époque il n'y avait pas de sponsors, mais il y avait des retombées médiatiques, les collectivités locales, même pour le club. J'ai été honoré de façon importante.

Financière aussi parce que l’état donnait des récompenses financières aux médaillés. Toutes ces retombées m'ont permis de me reconvertir facilement.

Maintenant ça existe toujours, et il existe quelques sponsors, ça reste marginale. Comme tu le fais remarquer aujourd'hui avec les nouvelles tendances d'application on peut suivre les open, ce qui donne de la visibilité. Alors peut-être, et c'est sincèrement souhaitable que le sponsoring se développe.

Après la médaille j'ai toujours continué à faire du sport. En ce moment c'est compliqué, les articulations ne veulent plus. J'ai continué les compétitions chez les vétérans, j'ai continué la course à pieds, j'ai fait des tas de cross et de course hors stade.

Je suis resté sportif jusqu'à l'année dernière. Le corps globalement ne veut plus. Il y a trois ans j'étais encore champion de France vétéran de kayak. C'est dans mon ADN.

Moi aussi j'ai eu le sentiment de perdre ma sensation de glisse, mais j'ai fait abstraction de ça 

C'était plus laborieux, mais j'ai continué. J'y ai toujours trouvé beaucoup de plaisir. Sport de plein air et de pleine nature.

C'est sur que la musculation ce n'était pas ma tasse de thé et je n'ai pas touché beaucoup de barre depuis la fin de ma carrière.

Les Secrets du Kayak : Je voulais parler avec toi de l'évolution du matériel, j'ai retrouvé des images de toi sur un kayak en bois, et les pagaies devaient être lourdes non ?

Patrick Lefoulon : Ah mais ça n'a rien à voir à l'époque. Il y a eu une évolution technique de la pratique par l’évolution du matériel. Et notamment avec l'arrivée des pagaies creuses.

Nous c'était des pagaies plates, en acajou. Juste après mon départ fin des années 1980, avec l'arrivée des pagaies creuses Wing, puis d'autres, jusqu'aux pagaies d'aujourd'hui Braca ou Jantex, c'est vraiment la révolution !

Je me souviens d'une discussion avec Alain Lebas qui était toujours entraîneur national après 1984, qui me disait avoir fait un 500m avec les pagaies creuses et qu'il faisait le même temps que lorsqu'il faisait les JO de Moscou.

La pagaie creuse a considérablement amélioré la performance des kayakistes.

Et au niveau du bateau, les bateaux en bois étaient beaucoup plus stables que ceux de maintenant.

Moi j'ai toujours un vieux Nelo, et je peux dire que les plus récents sont beaucoup plus instables que ceux de l'époque. Les vagues de côté ne nous faisaient pas peur, alors qu'aujourd'hui avec mon V1 je les crains davantage.

Ils sont profilés pour aller plus vite aujourd'hui. Les premiers carbones sont arrivés à Los Angeles, mais c'était des bateaux moins rigides que ce qu'on a maintenant avec des formes moins effilées.

A force de changer de matériel sur des bateaux plus récent , j'ai un peu retrouvé la glisse de l'époque. Mais vraiment, si à mon époque il y avait eu des pagaies creuses, peut-être que j'aurais pu franchir le dernier pallier pour être un champion olympique en monoplace.

Vraiment la première Wing que j'ai eu dans les mains, on sent que la propulsion est tout de suite beaucoup plus efficace, et on accroche l'eau nettement mieux qu'avec une pagaie plate qui soulevait l'eau et qui faisait des tourbillons plutôt que de la propulsion.

Alors oui aujourd'hui quand tu commences la discipline de kayak tu utilises des pagaies plates, mais il n'y avait pas de varios et tu achetais une pagaie plate avec une surface de pelle, et avec un angle.

Aujourd'hui les angles sont à 50°, ce qui me paraît aberrant, parce que vent de face ça doit être compliqué, mais là aussi je ne suis pas technicien.

Les angles étaient de 70-80° et la surface de pelle c'était au choix, comme pour les bateaux. Tu avais des bateaux pour les filles et les poids légers, une forme pour les athlètes et une forme pour les athlètes très lourds.

Maintenant, il existe toutes sortes de Nelo. Et pour les pagaies c'est encore pire. Et il existe aussi les varios qui sont un progrès considérable.

Après 1984 j'ai été représentant au comité directeur de la fédération en tant que représentant des athlètes de haut niveau. J'étais avec Marie-Françoise Prigeant-Grange, qui était DTN adjointe.

J'ai même était représentant des athlètes de haut niveau au comité au sein de la fédération, et même du conseil d'administration du comité national olympique français.

Donc je suis toujours resté investi dans le mouvement sportif, même si pendant un certain temps, comme j'avais une carrière politique, j'ai pris un peu de distance avec le mouvement sportif.

Mais une fois cette carrière politique terminée, je me suis à nouveau investi dans mon club, et au sein du comité régional. Je voulais apporter mon expérience, mon enthousiasme, pour notre discipline.

Je voulais changer un peu les choses. Je reconnais qu'en course en ligne, les règles de sélection sont assez claires, et respectées. Il paraît qu'en slalom c'est d'avantage discuté, mais je ne vais pas parler de quelque chose que je connais mal.

A l'époque on réclamait des règles de sélection qui soient clairement définies en début de saison et qui n'évoluent pas en fonction du contexte sportif, en fonction de la méforme de l'un ou de la bonne forme de l'autre.

Aujourd'hui je ne peux que me réjouir de cette victoire. Après il y a aussi la défiance des cursus de chaque athlète, puisqu'il y en a qui souhaitent garder une activité au niveau des études, et je pense qu'il faut qu'on les aide à pouvoir mener ce double projet afin d'obtenir les diplômes qui leur permettent une reconversion professionnelle dans les meilleures conditions.

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J'avoue que le fait que mes filles se soient mises au kayak, surtout mon aînée, ça m'a permis de me réinvestir complètement dans le kayak. Ça n'aurait pas été le cas si elles n'avaient pas décidé de faire une carrière dans le kayak. Ça compte beaucoup.

Là aux Open j'étais spectateur, coach, logisticien à soutenir ma fille qui participait à la finale de l'open. Il y a une double motivation quand tes enfants essaient de s'inspirer de ta dynamique.

Donc j'ai quatre enfants, et je les aient tous initié au kayak. Ma fille aînée faisait de l'athlétisme, et je pense y avoir été pour quelque chose. Elle se débrouillait bien, elle avait un niveau départemental.

Et un jour avec l'école, elle a fait une démonstration de kayak à l'entraîneur qui ne la connaissait pas et à tout le reste de sa classe, toute fière disant qu'elle avait appris avec son papa. Et de là elle a voulu s'inscrire au club la saison suivante.

Elle a débuté en Cadet 1. Mais avec son cardio elle a tout de suite performer.

Ma deuxième c'est pareil, sauf qu'elle a touché à plus de sports : équitation, ski... mais elle vient doucement au kayak parce que l'ambiance familiale y tend.

Les Secrets du Kayak : J'ai vu récemment que tu t'étais présenté sur une liste d'élection FFCK, comment tu vois la course en ligne actuellement en France ? Quelles évolutions tu aimerais voir à l'avenir ?

Patrick Lefoulon : La course en ligne est historique depuis les premiers JO en 1936, c'est une discipline universelle pratiquée par une centaine de pays au monde. Ce que les disciplines d'eau-vive ne peuvent pas revendiquer.

Et je pense qu'il faut évoluer mais lentement. Je n'ai jamais été un fan du 200m, je pense que tu prends moins de plaisir à regarder ce type de course plutôt qu'une course de K1 500m ou de K1 1000m qui pour moi il y a un suspens, un changement de leader.

Pour moi c'est plus spectaculaire. Mais c'est un avis personnel qui n'est pas partagé par la fédération. Mais je pense qu'il y a le moyen de retrouver une audience et une notoriété. Et dire que la course en ligne est une discipline dépassée je ne suis pas d'accord !

Moi je prendrais toujours par exemple le biathlon qui est un sport de très faible notoriété, même très confidentiel jusque dans les années 2000, et d'un seul coup c'est devenu un sport avec une très forte audience TV et avec une très forte notoriété.

D'autant que Martin Fourcade est placé comme un des meilleurs athlètes français. Donc s'ils évoluent en gardant les bases de la discipline, ils peuvent devenir des sports avec une reconnaissance médiatique.

Il faut évoluer, j'ai des idées qu'il faudrait confronter avec d'autres. Et tu as raison de dire que de suivre les courses avec un drone, ça rajoute du spectaculaire, tu vois le réel effort des athlètes tout au long de la course.

Il ne faut pas perdre l'âme de se sport en sacrifiant tout au spectaculaire et à la reconnaissance médiatique.

Les Secrets du Kayak : Pour le peu que je connais du kayak, pour reprendre l'exemple de Martin Fourcade et de mon point de vue, j'ai l'impression que le kayak manque d'un leader dont les gens vont avoir besoin pour s'identifier. J'ai l'impression qu'il y a une sorte d'opposition chez les athlètes, qui se connaissent tous, difficile à franchir.

Patrick Lefoulon : Je ne pense pas que ce soit que Martin Fourcade qui a fait à lui seul le succès du biathlon. C'est un succès international, en Allemagne, dans les pays scandinaves et un peu partout.

Je pense que c'est parce que c'est devenu un sport spectaculaire avec des rebondissements avec des changements de leader possibles.

Pour moi ça va au delà et je pense que le kayak devrait s'en inspirer. Mais il ne faut pas que l'histoire de cette discipline soit sacrifiée pour de l'audience médiatique. Sinon on ne fait plus du sport mais du jeu sans frontière.

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Les Secrets du Kayak : J'ai cru comprendre que le K1 200m n'allait plus faire partie des JO de Paris au profit du kayak extrême ? Est-ce que d'après toi on en va pas dans le mauvais sens ?

Patrick Lefoulon : Moi j'ai pris position dès le départ sur le sujet en disant que ça devenait paddle circus. Que c'est une discipline qui n'existe pas, il n'y a pas de championnat de kayak d'extrême ou s'il y en a eu un, il y a eu très peu de concurrents à Pau l'année dernière.

On supprime des épreuves de course en ligne pour une discipline qui n'existe pas ! Créée artificiellement pour essayer d'avoir du spectacle, et de plaire au grands majors de la télévision.

On sacrifie les bases du sport au profit des impératifs des télévisions. Et supprimer le K1 200m pour cela, je ne suis pas certain que ce soit aller dans le bon sens et dans le sens de ce qu'avait proposé Pierre de Coubertin il y a plus d'un siècle.

On perd une partie de la philosophie sportive établie à l'origine, c'est au sportif de décider de l'avenir de leur discipline et non pas la télévision.

Alors ta question sur le relais c'est un très bonne idée, à mon époque il y avait des course de relais, et l'épreuve existait au championnat du monde. Le problème c'est qu'à l'époque, il n'y avait pas de sabot au départ, donc c'était volé systématiquement au départ.

Tous les relais étaient volés c'est pour cela que ça été abandonné et à juste titre. Puis il y a eu les sabots, les relais étaient un peu plus équitables. Oui je regrette que ces courses aient été abandonnées, il y avait un côté spectaculaire, tout comme les courses de K2 mixte. Elles témoignaient de la vitalité d'une fédération dans un pays.

Ça reste des voies à explorer tout comme la Short Race aussi c'est pas mal, il y a pas mal de rebondissements et ce n'est pas aussi long qu'un marathon. Ça ne dure que trente minute, ça frotte un peu parce qu'il y a des portages, il y a de l'embarquement et du débarquement.

Et une course sur 5000m, il peut y avoir aussi des surprises, ça peut être des pistes de réflexions.

Je ne dois pas me faire que des amis, mais je l'ai écrit donc je peux le dire.

Donc je me suis présenté à la fédération pour apporter mon expérience d'ancien sportif professionnel, d'ancien élu, d'ancien champion, avec cette équipe qui a été battue mais je recommencerai s'il le faut.

La fédération fait du bon travail même s'il y a des choses qui m'emballent moins, mais je veux apporter mon obole pour faire avancer mon sport.


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