Interview : Hervé Duhamel

Ceci est une retranscription écrite du podcast enregistré avec Hervé Duhamel en novembre 2022.

Les Secrets du Kayak - Comment vas-tu aujourd’hui ?

Hervé Duhamel : Super bien, merci.

Les Secrets du Kayak : Peux-tu te présenter ? Comment as-tu découvert le kayak ?

Hervé Duhamel : Alors j’ai 50 ans, j’ai commencé à l’âge de 12 ans au club de Louviers. A la base, je m’étais mis à la pêche avec une bande de copains. Au bord de la rivière je voyais les kayakistes, ça m’a interpellé. Et j’ai fini par choisir cette activité.

J’avais essayé le football avec les copains mais je n’y avais pas de talent. J’avais fait du judo également.

Au départ, c’était pour m’amuser mais ce club était historiquement un grand club de canoë-kayak notamment en course en ligne. La culture de ce club faisait qu’on pagayait quand même pour être performant, même si c’était pour s’amuser. Le dimanche, on faisait des compétitions de slalom-descente et course en ligne. J’aimais beaucoup la descente. Mes potes faisaient de l’eau-vive. J’ai eu de la chance parce que j’ai pu naviguer sur plein de milieux, avec beaucoup de polyvalence.

Les Secrets du Kayak : Cette polyvalence est indispensable à tes yeux pour performer ?

Hervé Duhamel : Pour performer, j’en ai aucune idée. Moi dans mon imaginaire, quelqu’un qui pratique en compétition notamment en course en ligne mais qui n’est pas capable de se déplacer sur les Gorges de L’Ardèche pendant ses vacances, je trouve cela un peu dommage. Mais ce n’est pas rédhibitoire pour la compétition de haut niveau.

Les Secrets du Kayak : Ton entraînement était essentiellement axé sur la descente à un moment ?

Hervé Duhamel : Quand tu es minime, il y a les Régates de l’espoir. En Normandie, il y avait un super bon niveau en course en ligne. J’ai vite fait des podiums. Ça m’a boosté en course en ligne. En cadet, je faisais les championnats de France de course en ligne et de d’eau-vive. Ce n’est qu’en junior en sport étude que je me suis concentré sur la course en ligne. En eau-vive, je n’étais pas bon en slalom mais j’aimais bien.

Les Secrets du Kayak : Quand tu intègres sport étude, cela devient beaucoup plus qu’un amusement ?

Hervé Duhamel : On s’entraînait sur la base du plaisir, pas de la contrainte. J’ai toujours aimé m’entraîner. On était un bon groupe, on faisait du kayak, de la course à pieds, du VTT, de la musculation… on a eu la chance d’être bien éduqué pour cela. Ça prend tout de même une autre dimension, il te faut être performant sur les compétitions. J’ai eu de la chance, j’ai eu de bonnes participations, j’ai eu de bonnes saisons et de bonnes sélections.

Les Secrets du Kayak : Avant le sport étude, quel était ton rythme d’entraînement ?

Hervé Duhamel : Nous, on était au club tous les jours. On y a passé des heures et des heures. On y passait toutes nos journées pendant les vacances. Il n’y avait pas toujours les entraîneurs. A l’époque, la Normandie était composée de cinq départements. Il y avait donc cinq cadres d’État, deux CTR. J’ai connu le kayak gavé de subventions publiques. On faisait de supers stages dans les Alpes, dans le Morvan.

Les Secrets du Kayak : Jusqu’à quand vous vous êtes suivis avec la bande de copains ?

Hervé Duhamel : Dans la bande de copains du club, je n’ai pas été le seul a devenir un bon athlète. On est parti à deux en sport étude à Boulogne-sur-Mer. Les autres sont restés sur l’eau-vive.

Les Secrets du Kayak : Quand tu rentres en sport étude, est-ce qu’il y a de grosses différences en terme d’entraînement par rapport à ce que tu faisais ?

Hervé Duhamel : Oui, les partenaires d’entraînement ne sont plus les mêmes, tu t’entraînes dans un groupe où pour toutes les activités tout le monde a un bon niveau. Après les entraînements et le volume ressemblaient à ce qu’on faisait. Sauf que la marche est un peu plus haute, les intensités sont plus longues, les enchaînements sont différents.

Les Secrets du Kayak : Quand tu rentres en équipe de France junior c’est une surprise pour toi ?

Hervé Duhamel : Ça parait être une suite logique des podiums fait en cadet et junior 1. J’arrivais à accrocher la catégorie qui, en international, avait un niveau correct. Oui, tu t’y attends quand même. Tu fais la saison avec le collectif France. Ça représente des stages, deux régates internationales et les championnats d’Europe et du Monde.

En K4 junior, on fait un podium sinon rien de transcendant. Rapidement, je me rends compte que je ne suis pas un super bon compétiteur. Moi ce que j’aimais, c’était l’entraînement. Je n’avais pas de plaisir en compétition. Mon état psychologique n’était pas le même. J’ai continué tout de même longtemps. Par la force des choses, je me suis rendu compte que je voulais devenir entraîneur.

Les Secrets du Kayak : Comment tu découvres cette envie de devenir entraîneur ?

Hervé Duhamel : Ça commence à m’intéresser à force de rencontres avec des entraîneurs. L’articulation des entraînements m’intéressait. Je prenais du plaisir dans le fait de partager une progression dans l’activité.

Les Secrets du Kayak : A ce moment là, tu fais quelles études ?

Hervé Duhamel : Je suis au lycée et pour devenir entraîneur il faut un Brevet d’État. Dès que je l’ai pu, à mes 18 ans, j’ai tout fait pour le passer. Le lycée ne m’intéressait pas. Il y avait le tronc commun et la partie spécifique.

Les Secrets du Kayak : Comment ça se passait pour passer un BE kayak, il y avait des prérequis pour chaque activité de kayak ?

Hervé Duhamel : Oui, à l’époque en slalom il fallait avoir une performance dans l’activité qu’on voulait. En eau-vive, il fallait valider un niveau en classement de course. Tu tirais au sort ta démonstration. Il fallait apprendre ce qu’était la fédération, le milieu du kayak...

Les Secrets du Kayak : Est-ce que ça t’a permis d’apprendre ce que tu recherchais sur l’entraînement ?

Hervé Duhamel : Pour ce qui est du BE1 non, en BE2 j’ai eu l’occasion de rencontrer de bons entraîneurs, là oui. J’ai aussi fait un BE sport pour tous. J’ai été amené à rencontrer un excellent basketteur, un bon footballeur aussi, un golfeur professionnel… j’ai eu l’occasion de rencontrer des gens d’autres pratiques ce qui a été intéressant.

Après le club de Louviers je suis allé au club de Vernon qui commençait à avoir une bonne dynamique, de bons pagayeurs, et une équipe dirigeante qui voulait faire des compétitions. J’ai été embauché et ça m’a permis de me payer mes BE. Ils m’ont forcé à me former. J’encadrais le mercredi et samedi. A cette époque, on maniait la pagaie. Il y avait de grosses vagues, on apprenait à faire glisser le bateau dans toutes les conditions. Est-ce que ça vaut vraiment le coup de pagayer quand les conditions sont très mauvaises pour les athlètes de haut niveau ? On peut se poser la question. Mais parfois il faut savoir pagayer sur autre chose qu’un lac flat.

Les Secrets du Kayak : Comment on fait pour pagayer quand les conditions sont désastreuses ?

Hervé Duhamel : On s’adapte, on essaye de trouver la meilleure solution en fonction de sa technique et de son physique. Dans certaines conditions, cette adaptation vaut le coup jusqu’à un certain point. Ça permet d’apprendre à tenir son bateau. Parfois les ondes de vague sont trop rapprochées, on ne peut plus percer dedans, on prend le risque de faire couler le bateau… il faut s’adapter, en règle générale en course en ligne la plupart du temps tu sers les abdos et tu traverses, mais ce n’est pas toujours le cas.

Les Secrets du Kayak : A tes débuts tu entraînes les jeunes, mais qu’est-ce que tu leurs apprend ?

Hervé Duhamel : A l’école de pagaie, tu es plus éducateur que entraîneur. Apprendre la culture sportive, aller courir, tu leurs apprends la culture sportive dans sa globalité, la vie de groupe, l’entraide. Pendant mes années de senior, c’était devenu une évidence pour moi que d’entraîner.

Les Secrets du Kayak : Tu continues la compétition en même temps que la validation de tes BE ?

Hervé Duhamel : Oui, j’ai fait tous les championnats de France. Je faisais toutes les piges. J’ai réussi à faire de bonnes courses. A Vernon, on avait une bonne culture de l’équipage, on avait de bons K2 et K4. J’ai été dans la course jusqu’à mes 21 ans. Moi c’était encore l’époque de l’équipe A et l’équipe B. A l’époque je ne saurais pas te dire pourquoi il sont revenus sur ce fonctionnement pour créer les U23.

Les Secrets du Kayak : Quand tu passes tes BE, tu te fais tes entraînements ou quelqu’un les fait pour toi ?

Hervé Duhamel : On les fait en collectif. Il y avait encore des cadres compétents en entraînement en Normandie à l’époque.

Les Secrets du Kayak : A 21 ans tu arrêtes la compétition, est-ce un tournant professionnel pour prendre en charge des athlètes plus âgés ?

Hervé Duhamel : J’arrête la compétition mais je continue à faire des courses en espérant me sélectionner en monoplace. Je continue à faire toutes les mêmes courses, pour rencontrer des gens, retrouver des copains. Ensuite en équipage, c’est autre chose. En K1, je n’avais plus de motivation profonde pour me sélectionner. Je m’entraînais toujours autant. Certaines fois, je remplaçais plus facilement les séances par autre chose. J’ai toujours aimé faire du sport.

Les Secrets du Kayak : A partir de quand tu entraînes des personnes plus âgées ?

Hervé Duhamel : Au club de Vernon, j’y suis resté quatre ans. Pour le BE 2, je suis allé à Rouen. Je me suis inscrit dans un autre club qui m’a financé mon BE2, et là j’arrête la compétition. J’ai davantage encadré de l’eau-vive. Je faisais du vélo, de la course à pieds, j’ai refait du slalom, et j’ai entraîné surtout des jeunes de 14-17 ans. Il n’y avait pas une grosse culture sportive. C’est l’année d’après où j’ai changé pour le club de Condé-sur-Vire et que ça s’est intensifié. J’avais fini mon diplôme, mon service militaire au Bataillon de Joinville. C’est en arrivant à Condé que je suis vraiment devenu entraîneur.

Les Secrets du Kayak : On navigue sur quel type de plan d’eau à Condé ?

Hervé Duhamel : Sur une petite rivière, la plus grande ligne droite fait 300m. L’aller retour fait 4km, c’est protégé du vent. Ça a un côté carte postale. C’est un club qui a un peu plus de 50 ans. Ça fait 40 ans que le club rapporte des médailles aux championnats de France, aux JO.

Les Secrets du Kayak : Ça te met la pression en tant qu’entraîneur ?

Hervé Duhamel : Non, c’est valorisant de côtoyer des gens qui ont de bons résultats.

Les Secrets du Kayak : De toute cette expérience en tant qu’athlète et entraîneur, qu’est-ce que tu mets en place ? Tu as une vision particulière sur l’entraînement pour performer en course en ligne ?

Hervé Duhamel : Oui évidemment. J’ai une vision bien précise de ce qu’il faut faire. Mais il n’y a pas de secret. Chaque individu doit trouver la meilleure façon pour exprimer son potentiel physique, psychologique, technique. Pour ce qui est de la technique il y a des façons d’aborder certains thèmes qui sont plus pertinents que d’autres.

Il y a pagayer joli et pagayer efficace. Trop de fois, les analyses techniques sont conditionnées par des choses non objectives telle que la beauté pour l’œil. Ce qui est limitant. D’un point de vue technique, je considère que le coup de pagaie ne commence pas tel qu’on le pense. Pour moi, on ne passe pas assez de temps sur la phase aérienne du coup de pagaie. A mes yeux, ça ramène à des critères de création d’appuis, travailler avec des pagaies différentes, à différentes cadences. La phase aérienne pour trouver du relâchement est négligée, on passe trop vite dessus. On met trop d’importance sur l’attaque de la pagaie et le tractage du bateau.

Les Secrets du Kayak : Si je comprends bien, cela ramène à des notions de gainage du bas du corps ?

Hervé Duhamel : C’est faire en sorte que le bateau soit le plus haut possible sur l’eau par l’action de la pagaie.

Les Secrets du Kayak : En terme d’entraînement, ta génération faisait énormément de volume d’entraînement. Aujourd’hui ce n’est plus le même volume, est-ce que tu as un avis sur le sujet ?

Hervé Duhamel : Ce qui est sur c’est que ces dernières années, avec l’ultra spécialisation du 200m, on s’est trompé. Les volumes d’entraînement sont devenus trop faibles. Il y a des volumes minimums à réaliser, élevés, et qui sont à réaliser pour gagner. On ne peut pas prétendre être performant à haut niveau en faisant de petits volumes d’entraînement. J’ai l’impression que le volume aérobie et le travail de puissance aérobie a été écourté.

Les Secrets du Kayak : Je remarque que certains athlètes ont peu de séances d’aérobie à basse intensité, pensant que ça peut les faire perdre en explosivité. Qu’en penses-tu ?

Hervé Duhamel : Pour moi c’est plus une histoire de la culture de l’effort, ou l’éducation à certains efforts à certains âges. Je pense qu’il y a plein de gens qui pensent cela parce qu’ils n’ont jamais fait d’efforts longs et qui ne savent pas les apprécier.

Les Secrets du Kayak : Moi j’ai la sensation que lorsque tu manques de condition aérobie, dès que tu fais un effort aérobie un peu long ça te fatigue tellement que ça impacte effectivement tes performances en force et en explosivité.

Hervé Duhamel : Oui pour certains individus. Mais on s’entraîne à tout. A augmenter ses points faibles. Je reste persuadé que pour avoir une bonne solidité pour le jour J, il faut avoir un minimum d’endurance.

Les Secrets du Kayak : Cette endurance ne pourrait pas être développée en dehors du bateau ?

Hervé Duhamel : D’un point de vue technique, il faut passer du temps dans le bateau pour naviguer dans toutes les conditions climatiques. Si tu passes 20h dans une salle, il reste peu de temps pour faire du bateau.

Les Secrets du Kayak : Pour parler planification avec toi, dans la majorité des sports on voit une période foncière, puis une période spécifique, et compétitive. On différencie en hiver un travail d’aérobie, de plus gros volume… parfois tu peux avoir du polarisé à l’extrême, ou un peu de tout avec des valences dans la semaine pour garder plus ou moins les mêmes volumes d’entraînement toute l’année. Quel est ton retour sur le sujet ?

Hervé Duhamel : En terme de planification l’hiver je fais de l’aérobie, au printemps de la puissance aérobie, et avant les championnats je fais du lactique. Ce qui est certain c’est que toutes les filières sont travaillées au cours de l’année. Il y a des blocs notamment lors de la force où tu fais un peu moins d’aérobie. Le travail de la VMA doit se faire toute l’année.

Ce que j’ai remarqué c’est que tout fonctionne, peu importe que ce soit du volume vers la puissance ou inversement. Si tu descends un peu le niveau pour espérer un petit gain quand tu vas remonter. Tout s’articule ensemble. Tu vas changer la balance, le temps de l’intensité pour que le jour J toutes les pièces du puzzle soient réunies.

Les Secrets du Kayak : Est-ce que tu utilises des calculateurs de charges d’entraînement ?

Hervé Duhamel : Oui mais il faut savoir que depuis 2012, je ne suis plus entraîneur. J’accompagne l’équipe de France de marathon. Je n’ai plus un travail de recherche permanente pour ces choses là. En revanche oui c’est comme tout, ce sont de très bons outils à tester mais ça ne reste qu’un outil. Il faut savoir le prendre au bon moment. C’est là qu’intervient la complexité du sport du haut niveau. On peut avoir un appareil sur le manche de pagaie pour avoir quelques données. Pour avoir travaillé au début du minimax, j’ai trouvé que c’était un bon outil, mais il faut éviter de lui donner trop d’importance pour ne pas se perdre dans des zones techniques qu’on ne maîtrise pas.

Hervé Duhamel avec Jérémy Candy et Quentin Urban

Les Secrets du Kayak : Est-ce un moyen de déterminer chez un athlète des différences entre la puissance développée et la façon de pagayer ?

Hervé Duhamel : Oui dans les grands traits, non dans le sens où les données ne se recueillent pas en instantané mais suite à un débriefing. On est dans des gestuelles où la reproduction exactes de ton geste est complexe.

Les Secrets du Kayak : Chacun a un peu sa propre technique. Moi je reste perplexe sur la hauteur de la main supérieure. Est-ce que tu as un conseil à ce sujet ?

Hervé Duhamel : Chacun a sa bonne hauteur de main. Il faut que sa hauteur de main au dégagé soit en cohérence avec la hauteur du départ. Quand la pagaie va rentrer dans l’eau, moi je regarde la hauteur de la main supérieure à la fin du coup de pagaie. C’est une hauteur qui indique la limite du pagayeur. C’est la bonne hauteur du moment à cet instant pour le pagayeur.

Pour moi une main n’est ni trop basse ni trop haute, mais on avait repéré qu’au dégagé, la pointe arrière du bateau s’enfonçait, le bateau devenait lourd. On recherchait à alléger le bateau au moment du dégagé. Tu l’obtiens dans ton gainage, la position dans ton siège, et grâce au mouvement de fin de pagaie. Sinon chacun pagaie comme il le veut. Sur du sprint, peu de gars sont performants en ayant la main basse.

Les Secrets du Kayak : Tu es resté combien de temps à Condé sur Vire ?

Hervé Duhamel : Trois ans, et ensuite je suis allé sur le pôle de Caen, un pôle espoir course en ligne descente, et slalom pendant trois ans. J’ai été entraîneur de la structure du pôle. J’entraînais toute la journée les jeunes. Ensuite, j’ai eu des athlètes étudiants qui ont voulu rester. D’autres voulaient venir s’entraîner là-bas. Il y a eu du monde.

Les Secrets du Kayak : Tu es resté longtemps au pôle espoir de Caen ?

Hervé Duhamel : Douze ans, trois olympiades. Entraîner les jeunes, c’est super important. Je me suis rendu compte que le versant éducateur est bien plus important que le versant entraîneur. En toute honnêteté, j’ai eu la chance de croiser la route de sportifs de très bon niveau. C’était assez facile. Ils ont juste besoin de bonnes bases d’éducation sur les efforts à mettre en place pour avoir de bons résultats.

Les Secrets du Kayak : Pour reprendre les propos de Xavier, moi qui suis novice, je pense que la technique tu peux toujours l’améliorer, quel est ton retour d’expérience sur les jeunes ?

Hervé Duhamel : Xavier a connu le tout début de Kersten, et moi je suis arrivé une fois que « la révolution de Kersten » était passée. Dans un premier temps, les athlètes n’étaient que très peu habitués à pagayer hormis quelques uns. C’était des tout petits volumes pour faire ce qu’on aime comme on aime. Tu avais des exceptions comme Pascal ou Philippe, mais sinon on n’était pas bon parce qu’on ne s’entraînait pas assez, et sans rigueur.

Moi je n’ai jamais eu ce problème avec les athlètes, ils étaient conscients du volume à effectuer pour progresser à l’entraînement. En terme de technique, je ne me suis jamais pris la tête. J’ai toujours fait attention au pagayer beau.

Les Secrets du Kayak : Pourtant Sébastien Jouve, alerte au moindre détail pour performer, était à fond dans la prise de tête de détails, votre mariage devait être assez intéressant à suivre ?

Hervé Duhamel : Pour ce qu’il me demandait, je lui disais ce que j’en pensais. On passait à autre chose pour parler de choses plus importantes, on s’éclairait ensemble, c’est une relation, des échanges, les deux sont compatibles.

Les Secrets du Kayak : Sébastien est partisan de se donner à fond à chaque séance. Est-ce que pour toi les séances tranquilles doivent exister, est-ce qu’il doit avoir un management de l’intensité ?

Hervé Duhamel : Quand tu es un jeune athlète en début de carrière, il faut que ton cœur soit dans certaines zones, et qu’il cravache un peu. A un certain âge et avec plein d’expérience, alors que tu dois gérer la saison et les olympiades, tu imposes davantage un curseur un peu plus bas. Quand tu es jeune, il faut y aller !

Les Secrets du Kayak : Qu’est-ce qui fait que tu arrêtes au bout de douze ans à Caen ?

Hervé Duhamel : Entraîneur c’est les heures décalées, travailler les vacances scolaires, les week-end. A 40 ans changement de vie, envie de voir autre chose.

Les Secrets du Kayak : Tu ne voulais pas être entraîneur de l’équipe de France ?

Hervé Duhamel : Entraîneur des équipes de France, j’ai eu l’occasion de faire pleins de saisons, et aussi avec les senior en international, je connaissais. J’aurai aimé être à l’INSEP. Il aurait fallu que je vive autrement, déménager, et il fallait absolument être prof de sport pour cela.

Les Secrets du Kayak : Qu’est-ce que tu fais maintenant que tu n’entraînes plus officiellement dans le kayak ?

Hervé Duhamel : Je viens juste de finir de restaurer un bâtiment. Je m’occupe de ma famille. Je travaille sur mon autonomie alimentaire.

Officieusement, je travaille avec les athlètes de marathon. Leur budget est limité. Leur manager c’est Nicolas Parguel, certains sont de mes anciens athlètes. Donc quand ils m’ont demandé de l’aide ça m’a bien fait plaisir. C’est Quentin Urban avec qui je suis resté en contact qui m’a sollicité entre autre. Donc je les accompagne en compétitions, et au moins un stage par an. Là c’est réalisable, il y a de la pertinence et du sens. C’est plus de la préparation mentale de dernière minute.

Les Secrets du Kayak : Tu penses qu’à ton époque la préparation mentale t’aurais aidé ?

Hervé Duhamel : Oui bien sur. Mais quand tu pars avec un niveau faible, c’est rare de finir par être un champion. Peut être que comme j’ai connu ce genre de problème, j’ai pas mal de fois le sentiment que les athlètes apprécient certaines discussions avec moi.

Les Secrets du Kayak : Est-ce que tu navigues de temps en temps ?

Hervé Duhamel : Quand j’étais entraîneur je faisais zéro compétition. Quand j’étais en compétition, j’observais ce que j’avais besoin d’observer. Depuis que j’ai arrêté oui j’en refais pas mal de course en ligne. Je ne fais plus de championnats depuis trois ans. Ces dernières années, je me suis mis au vélo de route. Je roule pour le plaisir, et j’aimerais bien faire l’épreuve du Tour de France cette année.

Les Secrets du Kayak : Voulais-tu aborder d’autres sujets ?

Hervé Duhamel : Il faut travailler la culture du sport pour ne pas la perdre, il faut se faire plaisir pour progresser.

Les Secrets du Kayak : Merci de ton temps.

Hervé Duhamel : Et toi Rudy, ça va l’entraînement kayak ?

Les Secrets du Kayak : Oui ça va je m’entraîne entre 10-12 séances par semaine entre le kayak, la course à pieds et autre. Je travaille en ce moment avec une grosse pagaie, il va falloir que je varie les pagaies, travailler le gainage et la technique.

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